Saccages du soleil

Saccages du soleil

Eftihia Mihelakis et Clara Dupuis-Morency

Eftihia Mihelakis est écrivaine et professeure agrégée à l’Université de Brandon. Son approche s’inscrit en recherche-création à partir de laquelle elle s’intéresse à la folie (Mad Girl Studies, Mad Studies), la psychanalyse et les humanités de la santé. Elle a codirigé l’ouvrage, Embodied Narratives in the Literary Studies and Health Humanities (University of Toronto Press, 2025). En 2017, elle a fait paraître La virginité en question ou les jeunes filles sans âge (Presses de l’Université de Montréal). En 2020, elle a cosigné l’essai-dialogue, J’enseigne depuis toujours (Nota bene) avec Catherine Mavrikakis, Jérémie McEwen et Josianne Poirier. Ses articles sont parus dans les revues Romanica Cracoviensia, Tangence, Captures et Contemporary French and Francophone Studies : Sites. Son premier recueil de poésie, ούτις / nobody / personne, paraîtra aux Herbes Rouges le vendredi, 13 février.

Clara Dupuis-Morency est écrivaine et chercheure. Elle a publié le récit hybride Mère d’invention (Triptyque, 2018), le roman Sadie X (Héliotrope, 2021) et a participé à plusieurs collectifs, dont récemment Selfies. Autoportaits d’enfants du siècle (Cheval d’août, 2023) et Catherine n’est pas ici (Tête première, 2024). Sa thèse de doctorat en littérature comparée à l’Université de Montréal portait sur Marcel Proust et W. G. Sebald. Elle a complété un stage postdoctoral en recherche-création sur l’hybridité des formes du savoir et de la fiction à l’Université McGill (2018-2021). Depuis 2022, elle coordonne différents projets de recherche-création à l’Université de Montréal qui portent sur le soin, la maladie et la vulnérabilité en littérature, ainsi que deux infrastructures d’équipe financées par le Fonds de recherche du Québec : « À l’atelier. R(e/é)former les lieux du soin » dirigée par Catherine Mavrikakis et « Accueillir la parole de celles et ceux qui cherchent refuge » dirigée par Simon Harel.

En appelant aux saccages de l’astre solaire, à quels sabotages vous avons-nous convié⋅e·s ? Quelles lumières, quels pouvoirs, souhaitions-nous mépriser ? Et à quelle mission, possible ou condamnée, avons-nous convoqué la littérature ?

La figure du soleil arbore plusieurs visages contradictoires dans l’imaginaire littéraire et artistique. Dans la mythologie grecque, Ἥλιος / Hêlios est le dieu du Soleil personnifié ; ce dernier est représenté avec une couronne rayonnante chevauchant un char à travers le ciel.

Fig. 1. Anonyme, Hélios, vase à figures rouges, ca 430 av. J.-C., argile, © The British Museum, Londres.

Comme le rappelle l’helléniste Eleni Pachoumi, Hélios est un dieu « qui porte la joie au cœur des hommes », au point où dans d’autres textes antiques, le dieu est au cœur même de la fertilité : « la terre, écrit-elle, fleurit quand [il] brill[e] sur elle et les plantes sont fructueuses quand [il] ri[t] […]1Eleni Pachoumi, « The Religious and Philosophical Assimilations of Helios in the Greek Magical Papyri », Greek, Roman, and Byzantine Studies, nᵒ 55, 2015, p. 397. Nous traduisons. ». Vitesse, expansion et mobilité sont au cœur de cette figure embrasée qui sillonne le panthéon mythologique. Or, Hêlios est rarement vénéré à titre de divinité majeure en Grèce antique, sauf sur l’île de Rhodes qui lui consacre une statue gigantesque à l’entrée de son port, considérée comme l’une des Sept Merveilles du monde antique.

Fig. 2. Sidney Barclay, Le Colosse de Rhodes, gravure sur bois, dans Lucien Augé de Lassus, Voyage aux Sept merveilles du monde, Paris, Hachette, 1878, Wikipedia Commons.

Hêlios est aussi panoptes, celui « qui voit tout », prêt à sévir contre les délinquan·te·s. Dans l’Odyssée, Hêlios espionne les amants Aphrodite et Arès, et les dénonce à Héphaïstos, qui piège le couple dans des filets invisiblement fins pour les humilier et les punir. Énergie pyrophorique ou puissance oculaire se transforment en autant d’outils employés par les figures divines au sommet du panthéon, lesquelles les façonnent à l’image de leurs désirs. Encore dans l’Odyssée, Ulysse et son équipage se trouvent sur l’île d’Hêlios où les nymphes, filles du soleil, gardent son bétail. Lorsque les marins, à court de nourriture, tuent et mangent les animaux du dieu, Hêlios sollicite l’aide de Zeus pour exercer sa vengeance et décimer tous les marins sauf Ulysse, contraint de rentrer seul sur son île.

Et que dire d’Icare, porté par l’hubris des habiletés scientifiques du père Dédale, qui a su fabriquer des ailes, tout en avertissant son fils de ne pas voler trop proche du soleil. Porté par le désir de voler plus loin, plus proche des rayons du soleil, s’ouvre pour lui un monde d’interdits, de fautes et de conséquences fatales. C’est que la quête du Soleil, « avec son lot de promesses », écrit Clara Marciano, peut aussi se faire brûlure, un trop de clarté qui réduit le monde terrestre en cendres. Le soleil lui-même se consume d’une énergie qui va vers sa propre destruction, comme en parle Anahita Norouzi dans l’entretien accordé à Clara Dupuis-Morency. Allégorie de l’ambition humaine, symbole par excellence de la démesure et de la soif pour la connaissance illimitée, le Soleil exige pourtant une vigilance éthique dont l’articulation ouvre autant la voie à la surveillance et à la destruction, qu’à la désobéissance intergénérationnelle et la conscience accrue des frontières.

 

Fig. 3. Carlo Saraceni, La Chute d’Icare, 1606-1607, Museo Nazionale di Capodimonte, Naples.

Si, comme dans la République de Platon, Hêlios se situe dans la filiation du Bien, renouvelée à l’époque moderne puis avec la philosophie des Lumières comme le contrôle du réel par la pénétration de la lumière jusque dans les obscures entrailles des choses, le Soleil et ses (impitoyables) rayons sont plus que jamais associés aujourd’hui à un imaginaire de l’inhospitalité et à des expériences de l’invivable que génère la crise climatique.

Fig. 4. Christopher Michel, Smoke from the North Complex Fire Settles over San Francisco, photographie, septembre 2020, Creative Commons.

En bonnes héritières de Michel Foucault, nous nous méfions donc de ce soleil Panoptes, cette conscience qui émerge, avec la société moderne, de la croyance que tout peut être observé à tout moment, sous-tendant un régime de transparence des sujets non seulement dans leur identification à l’autorité de la loi, mais dans l’exigence d’une clarté à soi. À Hêlios rien n’échappe, il est prêt à surprendre et à dénoncer les coupables, les amants et les clandestins. Ce dossier appelle d’autres filiations : Sophie Rabau peint une descendance inconnue du soleil, d’enfants aux yeux noirs, qui dessinent ce sur quoi on restera muet.

SACCAGE À L’ŒIL QUI VOIT TOUT !

C’est cette visibilité du sujet face à lui-même que critiquera la psychanalyse, qui se développera comme une science du clair-obscur. Sa compréhension du sujet reconnaît les limites d’un inconnaissable en soi. Or, l’ombre se retranche, pendant que les algorithmes enregistrent nos moindres clignements oculaires pour traquer nos désirs et nous renvoient une version toujours plus égocentrée du monde. La littérature actuelle échappe-t-elle à cette attraction du soi, et surtout d’un soi entièrement éclairé, sujet de toutes les optimisations ? Et si l’on considérait les déserts d’un monde souterrain qui s’enlise en soi, en nous, comme une invitation à la traversée ?, demande Loxón.

À défaut de regarder le soleil dans les yeux, devrait-on plutôt écouter les vibrations sonores que ce dernier génère, comme le propose Isabel Voisin avec sa poésie sonore qui fait résonner autrement la photographie du Soleil réalisée par la sonde SDO Nasa/SDO ? Ou la littérature se fait-elle le prolongement de cette lumière bleutée d’un présent constamment communicable car représentable ? La notion de quête du réel n’est-elle pas a priori responsable de notre agonie partagée, se demande Magaly Roy ?

SACCAGE AU RÈGNE DU JOUR !

Nous voulons croire que la littérature peut faire luire les ténèbres sans abolir la nuit. Le soleil noir serait la figure d’une obscurité qui n’est pas amorphe, stérile, mais plutôt le lieu d’une autre création, libérant différentes morphologies et métamorphoses qui échappent au règne du jour. Dans le cadre du 13e dossier de MuseMedusa, nous avons demandé si notre soleil noir était encore l’astre mélancolique de Gautier, de Nerval, de Hugo, celui qui introduit par sa création de la nuit au cœur du jour. Dans le jour perpétuel des néons, des villes sans obscurité et des chambres éclairées à la lumière bleue des écrans, comment la littérature peut-elle offrir des lieux de clair-obscur, aussi artificiels et illusoires soient-ils ? Dans le flux constant d’une écriture qui retransmet les moindres signaux du présent, la littérature peut-elle se décaler sur un autre temps, et faire clignoter quelques luisances plus inactuelles ?

SACCAGE À LA DICTATURE DU RÉEL ET DE L’IMMÉDIAT !

Appeler au saccage du soleil, c’est aussi chercher un coin d’ombre où se reposer du devoir de s’exprimer, de témoigner de son expérience. Le clair-obscur, comme le style, est le lieu d’une dissimulation, d’un leurre. L’écriture y chercherait moins à exprimer une vérité de la douleur qu’à donner à lire les distorsions qu’introduit la souffrance dans la réalité. Mais croit-on encore à la fiction, à commencer par la fiction d’être soi ?

Louis-Thomas Leguerrier lit en Lourdes de Catherine Lemieux la satire de ce retour de la littérature contemporaine à la « pleine clarté du réalisme triomphant ». L’ironie et l’exagération seraient les armes proprement littéraires qui, plutôt que de fantasmer une obscurité originelle, forcent le trait des désirs actuels d’une lucidité totale, à la fois autoritaire et confessionnelle. Chez Unica Zürn, Elise Denis expérimente les forces d’un imaginaire qui occulte les lumières du réalisme narratif dans ce qu’elle distingue comme un motif de « l’éclipse poétique » à l’œuvre dans Printemps sombre. La clarté optique, désir de maîtrise totale sur le récit, est poussée à son potentiel hallucinatoire. Le soleil est regardé pour s’y brûler les yeux, et écrire sous l’influence de l’astre halluciné. Raconter correspond moins à faire la lumière sur sa propre histoire que de violenter la vérité de ses distorsions et de ses monstrueuses créations. Des créations de ce numéro œuvrent à mettre en voix ces distorsions du discours sur soi, et suivent les circonvolutions d’une langue qui prend le risque de se désaxer. Catherine Mavrikakis imagine une rencontre au soleil couchant entre Antonin Artaud et sa propre mère enceinte jusqu’au cou, alors qu’il se rend au théâtre du Vieux-Colombier, et qu’il hésite entre l’attraction mégalomaniaque et le désir de disparition. Que faire d’autre de cette fille étincelante et grosse de vie, qui semble née du soleil, que de lui jeter un sort ? La malédiction d’Artaud aura certainement écorché en passant quelques âmes à venir. Laurent McDuff fait entendre la voix d’un jeune homme qui succombe à la tentation d’être sa propre étoile, dans un lieu asilaire qui tente de contenir sa parole et, à coups « de diagnostics et d’édits », de la ramener à la loi de Galilée. Chez Samuel Desmeules, le diagnostic, mot qui veut en nommant la douleur sauver l’enfant de l’anormalité, devient l’axe autour duquel tourne incessamment la parole. Pour Tom Brabant, « l’astromorphisation » est cette illusion du sujet lyrique qui se prend lui-même pour un astre et qui peine à trouver son centre de gravité. Comme nous le donne à penser sa série d’images Faux-soleil à partir de lumières artificielles, le sujet n’a peut-être comme consolation qu’une parodie du soleil. Désaxé, décentré, mais toujours en quête de son individualité la plus authentique, le sujet qui pense planer chasse en fait des points d’ancrage pour son égo hypertrophié.

La plupart des textes qui paraissent dans ce numéro travaillent la frontière d’une écriture autobiographique préoccupée par les ressorts de la fiction et de l’imaginaire, nous rappelant que même (et peut-être surtout) l’authenticité se traficote. L’expérience souffrante, deuil, mort ou trauma, plane sur ces textes comme un « hélios funeste », impossible à regarder en face (au risque du délire), mais dont les stratagèmes et les artifices de l’écriture aideront les auteur·ice·s à s’approcher. Si l’artifice permet selon Adrien Savard-Arseneault une proximité qui n’est pas qu’authentique avec le suicide de la sœur dans les Mécanismes de survie en milieu hostile d’Olivia Rosenthal, Benjamin Gagnon Chainey rend la pulsion suicidaire chez Hervé Guibert gémelle de la luisance du mirage, alors qu’il nous la donne à lire dans ses métamorphoses et ses modulations les plus « spectaculaire[s] ». En érigeant « la mort en diva », l’œuvre de Guibert jette la lumière sur une époque accaparée, ensevelie, enivrée par la prolifération des créations thanatographiques. Mais la mort, elle ne nous demande pas notre avis, et on se la prend en pleine face. C’est alors elle qui prend la place du sujet écrivant, comme propose Frédérique Collette dans son texte sur Le Deuil du soleil de Madeleine Gagnon, alors que l’autrice se fait la traductrice de ce qu’elle ne pourra connaître. Elle « confère [ainsi] aux morts une vie posthume. » Or l’écriture de la mémoire et du deuil n’a pas le monopole des contrées obscures où le soleil peine à laisser sa marque.

Ce dossier propose en outre un travail sur la temporalité qui nous fait voyager, que ce soit en revenant dans la maison des ancêtres grecs pour entrer autrement en dialogue avec la relation mère-fils, comme le propose Tassia Trifiatis-Tezgel, ou dans un espace immémorial dont les strates se conjuguent à même la lenteur de l’évolution de la matière. En effet, le « minéral », écrit Sarah Boutin, dispose comme la figure d’Écho d’une liberté langagière à même les limites qui lui sont prescrites par son environnement : les deux désirent le rapprochement avec l’autre. « Ressentie, mais […] inconnue », désintéressée par l’autorité du langage scientifique qui désire toujours être à la fine pointe des avancées scientifiques sans jamais sombrer dans la science-fiction, Écho renaît aujourd’hui telle une figure subjective de la subversion qui réinvente les modalités esthétiques et épistémologiques de la cohabitation. Comme le montrait déjà Anne-Emmanuelle Berger dans son article « Dernières nouvelles d’Écho » en 1996, Écho traverse les Hymnes homériques et les poèmes d’Ovide, toujours « un trope de la répétition2Anne-Emmanuelle Berger, « Dernières nouvelles d’Écho », Littérature, nᵒ 102, 1996, p. 71.» : Écho, toujours représentée comme étant en face ou à côté, raconte en reprenant la voix, la musique de l’autre, mais elle n’est pas une simple imitatrice de Narcisse ou de Pan. « [D]iscoureuse3Ibid. », Écho défie la notion même d’auctorialité individuelle : on serait toujours au moins deux dans le processus de création. Munie d’un voile protecteur et d’ailes pour s’envoler, elle ne peut être attrapée, ni peut-elle être traquée. Serait-elle ainsi la voie d’une résistance à la toute-puissance fabulée du Soleil, qu’elle soit artificielle ou naturelle ? Simon Harel insiste ainsi à déterrer la figure de Patricia Hale-Naipaul ? du statut minoritaire que l’histoire littéraire lui a relégué en tant qu’épouse de l’écrivain V. S. Naipaul. En sollicitant le motif de la « contre-voix », l’histoire est appelée à prêter l’oreille à ces voix « d’à côté, les voix secondaires qui font partie de l’œuvre et qui posent, par leur place elle-même (être derrière, à côté), la question toujours cruciale du destinataire. » Dans la suite poétique de Chantal Ringuet, inspirée des oiseaux façonnés par Rober Racine, l’écriture se pense comme accompagnement. Présences parfois imposantes, parfois furtives qui en détalant font signe « dans les marges du temps / là-bas », là où la « lumière ne résonne plus ».

SACCAGE AUX MONOMANIES !

Ainsi, le clair-obscur dans lequel nous plongerait Hêlios et à partir duquel nous avons pu porter attention à l’émergence d’autres figures, jusque-là mises de côté, peut-il nous aider à penser en quoi la pensée littéraire continue de se tenir à part des volontés positivistes du savoir ? Hugo Satre cherche un peu d’obscurité dans un acte de lecture herméneutique où il revisite Spinoza à l’ombre de la lecture biblique que propose le philosophe et, ce faisant, fait émerger une pensée encore « implicitement littéraire ». Plus sombre, mais aussi plus polarisée que la lumière éclatante que braque le sujet philosophique et scientifique sur un monde dont il s’exclut, la littérature chez Spinoza se situe inévitablement in medias res, au sein du récit de notre appartenance au monde dont elle est constamment affectée. Maxime Fecteau pense, lui, les désastres de cette extériorité face à la nature dans laquelle s’est façonnée la subjectivité moderne. Dans un dialogue entre le film Avatar et l’œuvre du philosophe Bruno Latour, il tente de retresser les intrications du vivant qui fait de notre planète l’exception habitable du système solaire.

Car ne fait plus autorité la tradition intellectuelle qui voudrait qu’il y ait d’un côté les fabulations de l’objet littéraire et de l’autre une science critique qui y octroie ses lumières. Mais alors que la littérature elle-même se fait de moins en moins fabulatrice, assiste-t-on à un étrange renversement de cette dichotomie ? Les postures critiques de ce numéro tendent résolument vers un être-affecté·e de la critique, alors que le tournant autoréférentiel donne lieu à une parole essayistique qui assume la forme autothéorique. Pour Mathilde Savard-Corbeil, ce tournant ouvre la voie à « d’autres chemins du savoir », dont celle de notre relationnalité au monde des animaux, des oiseaux surtout, êtres dont les chants habitent le monde sans trop y laisser de traces. Brigitte Denker-Bercoff présente les deux faces de la lecture et de l’écriture en un diptyque hommage à Jacques Roubaud. Elle revient sur la relecture que ce dernier a proposé de la tradition du sonnet, en nous donnant à voir une beauté en contre-jour du canon, déplaçant son centre de gravité vers une poésie qui s’adresse non plus à l’amour perdu, mais au cosmos.

En malmenant la lignée du soleil, n’avons-nous pas nous aussi, secrètement, cherché à exalter nos désirs et nos angoisses vers une échelle cosmique ? En jetant des regards vers l’astre éblouissant, au risque d’une parole hallucinée, ne tendons-nous pas vers une grandeur astrale pour nos deuils, nos douleurs ? Dans le clair-obscur de nos ressentiments inconsolés, ne rêvons-nous pas de décoller vers le lointain, comme Icare, pour nous brûler de criminelles ambitions ? Hêlios, contemplant nos risibles efforts, raille bien certainement notre harangue, mais se réserve tout de même le droit de nous infliger quelque cruelle humiliation.

  • 1
    Eleni Pachoumi, « The Religious and Philosophical Assimilations of Helios in the Greek Magical Papyri », Greek, Roman, and Byzantine Studies, nᵒ 55, 2015, p. 397. Nous traduisons.
  • 2
    Anne-Emmanuelle Berger, « Dernières nouvelles d’Écho », Littérature, nᵒ 102, 1996, p. 71.
  • 3
    Ibid.