La manducation sentimentale

La manducation sentimentale

Daniel Laforest

Daniel Laforest est professeur titulaire à l’Université de l’Alberta. Il s’intéresse aux rapports entre la littérature et les humanités médicales. Il est auteur de L’archipel de Caïn. Pierre Perrault et l’écriture du territoire (XYZ, prix Jean-Éthier-Blais 2011), de L’âge de plastique. Lire la ville québécoise contemporaine (Presses de l’Université de Montréal 2016) et de Topor et le cinéma (Nouvelles Éditions Place 2020). Il a aussi co-dirigé Literary Narrative, the Biomedical Body, and Citizenship in Canada (PULIM 2016, avec G. Clermont et B. Rouby), et Inhabiting Memory in Canadian Literature (UofA Press 2017, avec B. Authers et M. Snauwaert). Il a été chercheur titulaire de la Chaire en études canadiennes des Universités de Limoges et de Poitiers, ainsi que professeur invité du programme Medicine and the Muse au Center for Biomedical Ethics de l’Université Stanford aux États-Unis.

L’anthropologue – Claude Lévi-Strauss, en l’occurrence – peut dire sans sourciller que nous sommes tous cannibales. À première vue, ça me convient. J’aime ce genre d’affirmation à l’emporte-pièce qui entend nous maintenir, sans exception, arrimés au sol le plus vil. De fait, ma chair est semblable, voire identique, à celle des autres et j’y trouve la plupart du temps du réconfort. Nous sommes tous des cannibales parce que nos corps sont entrelacés à même le monde matériel. Les chairs du monde sont engagées depuis l’éternité sur une voie sans retour qui les verra chacune en leur jour fatidique s’effondrer sur elles-mêmes. L’individu sera immanquablement ré-aspiré dans la masse du vivant, avec ses semblables. Mais il n’y aura par contre aucun anéantissement. En ce sens, le cannibalisme est la négation d’une négation. C’est l’acte qui, mettant l’autre à mort, par le fait même nie et révèle comme nulle autre l’angoisse de la disparition qui plombe la vie individualisée. Ovide l’écrivait déjà dans ses Métamorphoses, et d’autres plus près de nous comme Annie Dillard1Annie Dillard, Holy the Firm, New York, Harper Perennial, 1998 [1977]., Val Plumwood2Val Plumwood, The Eye of the Crocodile, Canberra, ANU Press, 2012. ou Emmanuel Coccia3Emmanuel Coccia, Métamorphoses, Paris, Payot et Rivages, 2020. ont repris l’idée pour en faire chez l’une une méditation spirituelle, chez l’autre un féminisme écologique radicalisé, chez l’autre encore une philosophie contemporaine : ce que nous appelons le monde du vivant est un gigantesque processus de mutation sans point d’arrivée. Il n’y aurait, fondamentalement, qu’une chair ; ses subdivisions innombrables ont pour nom, un bref instant, vous et moi. Mais nous savons que cela ne durera pas, car l’appétit quotidien qui nous tiraille individuellement est de même nature que celui qui fait se dévorer les animaux entre eux et qui fait ultimement se désagréger puis se recomposer les atomes entre le Soleil et tout ce qui remue dans sa lumière. Bref, le cannibalisme doit forcément avoir sa place légitime dans la danse plurimillénaire du vivant, et je n’y vois pas d’inconvénient majeur.

Quand j’y pense mieux toutefois, je sens poindre une inquiétude. Certes, je suis chair d’une autre chair – c’est notre lot commun – et je n’en garde pas un souvenir conscient. En outre, ma chair, bon an mal an, se découvre triste, comme le veut l’expression consacrée. Mais encore une fois, c’est une forme de destin naturel ; triste dans votre chair, vous l’êtes aussi parfois. Si inquiétude il y a, c’est plutôt parce que je sais, confusément, que ma chair n’est pas stable de mon vivant. Pourquoi ? Parce que je suis, paradoxalement, en santé. Entendons-nous, quand j’écris santé je ne parle pas d’un rapport quotidien d’adéquation avec ma propre personne et mes propres moyens physiques et mentaux. C’est là une définition tout à fait adéquate de la santé, mais il s’agit d’une santé que j’appellerais sentimentale puisque, dans la mesure où elle dépend de mon bon vouloir et de mes dispositions strictement personnelles, il est impossible que cette forme de santé ne soit pas l’objet de fluctuations plus ou moins spectaculaires. Il n’y a pas, en nous, dans notre chair, dans nos humeurs clignotantes, et dans la consommation inlassable que nous faisons d’autres corps biologiques, quoi que ce soit qui s’approche d’un barème de stabilité. Ce qui est juste assez pour moi sera trop pour vous et insuffisant pour un·e autre. Cela dit, je suis néanmoins en santé, jusqu’à nouvel ordre. Ordre qui me parviendra d’où ? D’une autre santé, érigée celle-là en système. Je dis système pour désigner la façon dont nous en sommes venus à replier les branches diverses de la profession médicale sur ses appareils de gestion. Système de santé donc : une appellation désormais aussi courante dans les médias que dans nos conversations, et, plus profondément, dans nos inquiétudes. Mon corps existe aussi dans les spécimens récoltés, les mesures localisées, les analyses ordinales, les corrélations statistiques, les évaluations provisoires, les prévisions à long terme qu’en fait le système de santé de mon époque, et rien ne me dit que je me retrouverai dans la tombe avec tous les organes qui m’ont été octroyés à la naissance. En ce sens, quand je parle de santé, je me découvre en quelque sorte plusieurs corps. Certains ont sans doute des parties discrètement dysfonctionnelles aux yeux d’une médecine spécialisée ou d’une autre, mais l’ensemble, me dit-on, se porte bien. Pourquoi, alors, ma santé m’apparaît-elle inquiétante ? Parce que je ne sais plus trop dans lequel de ces corps cannibalisés par la médecine systématisée logent ma voix et l’épaisseur sentimentale qui l’habite. Je vis avec ce savoir d’un corps livré à tous les calculs alors même que, dans mon âme et conscience, comme au début de la présente phrase, je persiste à dire « je ». Voilà bien le moment où, suivant nos habitudes acquises, il convient de se tourner vers la littérature pour voir ce qu’elle a à en dire.

Je rencontre aussitôt un obstacle de taille. Si nous sommes tous cannibales, alors pourquoi écrire ? Et même, pourquoi parler ? Convenons d’une chose : ce qu’on appelle cannibalisme au sens littéral est un acte qui, posé concrètement, ne laisse guère de latitude pour que quelque chose d’autre y fasse suite. Les intellectuels, artistes, mythologues que nous sommes rencontrent avec le cannibalisme un de ces très rares cas limites face auxquels leurs inclinations les plus légitimes (lire, interpréter, écrire, transmettre, créer) risquent de tomber dans l’absurde. Penser au cannibalisme, en parler, est une pente glissante vers un abîme bien connu dans nos sphères et qui revient à parler de ce qu’on n’a jamais expérimenté de près ou de loin. Écririez-vous sur une maladie funeste dont vous ne connaissez rien des douleurs et du désespoir afférents ? Décririez-vous la mise au monde d’un enfant sans en avoir connu vous-mêmes la réalité dans votre corps ? Ce sont des questions qui restent entrouvertes. Vous pouvez le faire, puisque d’aucuns diront que la littérature peut tout. Soit. Mais admettons maintenant que vous ayez effectivement ingéré la chair et le sang de votre prochain. Peut-être avez-vous dû le tuer au préalable. Trois avenues sont alors possibles. La première dit que vous êtes un·e monstre. La seconde ajoute que vous n’avez rien à faire ici. La troisième confirme que vous êtes dans un pétrin innommable. La criminalité de l’acte cannibale est une question secondaire. Vous êtes passé·e dans un ordre différent du monde, et vous n’avez plus quiconque avec qui jauger la signification de votre acte. Vous êtes dé-socialisé·e tous azimuts. Je vous invite donc à continuer la lecture en présumant que ni vous ni moi ne sommes cannibales, et, qui plus est, que ni vous ni moi ne connaissons une autre personne qui le serait. Précaution fastidieuse et inutile, me direz-vous. Mais pas du tout. Le cannibalisme ne connait qu’une bouche. C’est le même orifice où passent l’air et les mots qui font le langage et, par extension, les communautés humaines. Or, tous l’apprennent dès l’enfance, on ne parle pas la bouche pleine. En première comme en dernière analyse, la manducation et l’expression signifiante sont autosuffisantes et, par conséquent, incompatibles.

À ce stade, j’ai en tête une remarque du philosophe français Tristan Garcia à propos de l’hypothèse d’une communication langagière entre les mondes animal et humain. C’est très simple : s’il s’avérait que les animaux puissent un jour nous parler, il n’en découle pas nécessairement que ceux-ci auraient quelque chose à nous dire. Voilà ce qu’il faut garder à l’esprit avant tout. La comparaison est boiteuse, car il ne s’agit pas, pour nous ici, de faire du cannibalisme un acte seulement animal, encore moins de réduire l’individu anthropophage à une bête. Ce serait là deux moyens commodes de ramener l’inconcevable dans le giron du sens établi, comme on le fait pour le/la criminel·le-cannibale, ou le/la cannibale-monstre, ou encore le/la parent·e-cannibale. Si j’emploie cette comparaison, c’est plutôt pour souligner le fait qu’on ne peut s’approcher du cannibalisme que par l’emploi de la métaphore. Tout ça pour ça ? Tous ces préalables et pirouettes pour atterrir bêtement, comme un bleu, sur la notion la plus ancienne de la poétique littéraire, la bonne vieille métaphore usée jusqu’à la corde par les siècles accumulés ? Voyons-y de plus près. La métaphore est le rapprochement de deux significations au préalable étrangères l’une à l’autre, et qui résulte en la création d’une troisième signification inédite, souvent inattendue. Depuis les années 1920 au minimum, les cognitivistes nous enseignent que la métaphore précède le langage. Le rapprochement qui fait tout son sel serait un rouage – si ce n’est LE rouage – qui sous-tend l’action conjointe de nos appareils perceptifs et cognitifs. Nous pensons sous forme de métaphore. C’est pourquoi le rêve d’une communication langagière entre animaux et humains n’a d’intérêt que pour ce qu’il fait apparaître, passé le rapprochement initial, dans notre inventaire de mythes modernes : non pas des messages sémantiques échangés entre deux règnes du vivant, mais, au contraire, un monde plus hospitalier où l’opacité du règne animal se serait résorbée dans un anthropomorphisme tous azimuts. On ne peut donc parler du cannibalisme que par l’emploi de la métaphore. Fantasme vain, par conséquent, qu’une fiction cannibale ? Pas nécessairement. Une fiction peut véhiculer des idées ou des dispositions monstrueuses, tandis qu’une métaphore peut, elle-même, être monstrueuse, disproportionnée, scandaleuse. Une métaphore peut transmettre un rapport de force en tant que tel. Quand nous représentons le cannibalisme, quand nous écrivons sur l’appétit et la dévoration entre individus d’un même monde, il faudrait sans doute nous attarder davantage sur ce qu’il advient de la personne dévorée. Ou plus précisément, sur ce qui reste de signification une fois l’acte accompli. C’est l’équivalent exact du troisième terme issu de la rencontre métaphorique, le sens neuf qui jaillit soudain. La personne dévorée peut être absorbée jusqu’à la moelle, transmuée en toute l’énergie vitale qu’on voudra chez l’autre, il n’en demeure pas moins que la rencontre cannibale crée toujours un reste. C’est cela, je crois, que la pensée littéraire est en mesure de montrer mieux que d’autres.

Le pauvre Père Goriot se fait manger par ses enfants ingrats. L’expression est fréquente dans la littérature réaliste de l’époque. Se faire manger, c’est se faire dépouiller de ses ressources, la plupart du temps pécuniaires. Histoire classique, dix-neuviémiste : Balzac a représenté le cynisme du capitalisme comptable en plein essor et qui déjà n’avait aucune hésitation à enterrer vivants les plus faibles. Goriot était âgé, son corps ne tenait déjà plus. Il n’y a rien pour nous surprendre dans sa chute. Mais que reste-t-il à l’arrivée ? Il reste la bonté du vieillard, esseulée et flageolante, devenue risible dans un monde convulsé par les plaisirs sans lendemain. Sa bonté n’a pas été anéantie. Au contraire, ceux qui ont dévoré Goriot jusqu’à la mort ont indirectement mis celle-ci en exergue. Dans l’adaptation en 1959 par Joseph Mankiewicz du texte de Tennessee Williams Suddenly Last Summer à partir d’un script de Gore Vidal, une femme atteinte d’amnésie à la suite d’un trauma est lentement broyée par le système psychiatrique américain et les pressions familiales qui voudraient lui faire subir une lobotomie. On apprendra, à la fin du récit, que la scène traumatique consistait en une improbable péripétie de voyage au terme de laquelle la femme a vu son cousin, gai inavoué, se faire tailler en pièces puis dévorer par une horde de jeunes prétendants cannibales sortis d’on ne sait où. Le cannibalisme est littéral et explicite. Ce qu’il en reste ? Tout le film, puisque son sujet consiste en l’auscultation de la violence perpétrée par l’establishment médical envers les femmes souffrant de détresse mentale, en plus de l’homophobie à peine larvée de l’époque. Cette fois, le cannibalisme est littéral, mais son pouvoir d’évocation est encore métaphorique. C’est la dévoration qui fait basculer les choses, mais c’est le reste qui, en définitive, compte vraiment.

Revenons à l’inquiétude que j’ai exprimée quant à l’instabilité de ma condition charnelle aujourd’hui. J’ai laissé entendre que la manducation médicale des corps contemporains était en voie de remplacer la manducation sentimentale du corps-à-corps des anthropophages d’antan. Le système médical contemporain dévore notre idée même d’un corps cohérent. Voilà une belle et forte métaphore. Encore faut-il demander de quelle médecine il s’agit. Comment le sentiment d’un corps propre dans une correspondance plus ou moins harmonieuse avec sa voix et le « je » qui l’anime ont-ils pu se déliter sur le temps long ? La réponse tient dans le fait que l’institution censée maintenir mon corps à l’écart de la souffrance et de la mort a, durant les quelque 150 dernières années, modifié en profondeur le regard qu’elle porte sur ce corps et sur tous les autres. Ce faisant, elle a contribué à rendre on ne peut plus instable la croyance que nous entretenons entre l’histoire d’une vie et l’histoire du corps y correspondant. La médecine, depuis au moins la seconde moitié du XIXe siècle, a cannibalisé, dépiécé, avalé, puis digéré, selon ses propres termes, l’idée que notre propre corps nous suivra jusqu’à la fin.  

Les mythes ancestraux s’accommodaient du cannibalisme au sens littéral précisément parce que le destin individuel, ou la cohésion communautaire, ou encore l’honneur préservé sous un nom unique, n’y étaient pas mis en cause. La dévoration du cœur de l’ennemi devait faire passer son courage et sa vitalité intacts dans la bouche et les viscères du vainqueur. Les rites sacrificiels impliquant le cannibalisme avaient pour socle la communauté restreinte qu’ils contribuaient à cimenter. La médecine prémoderne occidentale favorisa par la suite des pratiques basées sur la même certitude d’une enveloppe corporelle certes promise à tous les maux, mais au moins cohérente et inaliénable : on était des sacs d’humeurs sur lesquels des saignées pouvaient être pratiquées afin d’expurger les mauvaises intrusions extérieures et rétablir l’équilibre. Vers la fin du XIXe siècle, la donne a changé. Le corps et le soi inaliénables se sont retrouvés sur le bas-côté, là où gisait depuis peu la bonté sans objet du Goriot de Balzac. L’invention du stéthoscope dans la seconde décennie du XXe siècle par René Laennec a ouvert la voie à l’exploration de ce qu’on allait bientôt appeler le « milieu intérieur » du corps humain4Roy Porter, The Greatest Benefit to Mankind: A Medical History of Humanity, New York, W.W. Norton & Company, 1997, p. 308. Voir aussi Frédéric Worms, « Comment la notion de milieu intérieur a-t-elle transformé la vie », Radio-France (émission Avec philosophie), décembre 2022, https://podcasts-francais.fr/podcast/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/comment-la-notion-de-milieu-interieur-a-t-elle-tra.. Le premier examen de tissus humain sous microscope aurait eu lieu bien avant, au milieu du XVIIe siècle en Italie. C’est cependant dans les nouveaux laboratoires des physiologistes héritiers des théories de Xavier Bichat que l’observation médicale fragmentaire du corps humain a pris son essor. C’était un continent renouvelé, un champ de recherche hospitalier aux yeux de la médecine scientifique, car délesté de l’encombrante présence de la personne auquel le corps devrait, en toute autre circonstance, correspondre. Le mot d’ordre n’était plus de guérir la maladie, mais de l’étudier comme une réalité biologique dont l’inventaire complet, une fois atteint, allait ratifier la domination du savoir rationnel sur le désordre de la vie. Le corps humain d’une personne vivante et parlante devait, pour entrer dans ce nouveau lexique de la science médicale, se désagréger en autant de catégories, tissus, fluides et processus. Les cannibalismes antiques ou mythiques se concentraient sur les organes comme points de repère identifiables en vertu desquels la mémoire du dévoré restait signifiante. Or il y a longtemps que le regard de la médecine moderne est passé au-delà des organes5Les travaux de Nikolas Rose ont décrit cela en détails dans un cadre théorique différent, celui du biopouvoir et de la biopolitique. Voir : Nikolas Rose, The Politics of Life Itself : Biomedicine, Power, and Subjectivity in the Twenty-First Century, Princeton, Princeton University Press, 2006.. Cellules et molécules, gènes et transplants, plaquettes et plasma : ce que regarde la médecine n’a dorénavant plus grand rapport avec ce que vous appelez « je ».

Avez-vous déjà vu vos viscères ? Je présumerai que non. Et c’est curieux, au fond. Ce sont vos viscères qui vous maintiennent en vie, ni plus ni moins, et vous les trimballez partout où vous allez. Dans notre conception traditionnelle du cannibalisme, la viscéralité6J’emprunte le terme au phénoménologue américain Drew Leder. Voir : Drew Leder, The Absent Body, Chicago, University of Chicago Press, 1990. était un moment rare de grande révélation cruelle. L’être dévorant, en plus de tuer, découvrait au grand jour le milieu interne de la personne dévorée. La médecine moderne, pour sa part, a parfaitement vu vos viscères. Ou plutôt, elle n’a pas besoin de les voir puisqu’elle les connait au point de savoir de quelles infimes particules et microbes elles se composent. Le monde qu’elle a façonné avec son regard de plus en plus millimétré, c’est le nôtre. La dévoration qu’il faut attendre, c’est la sienne en tant qu’elle ne nous laissera pas vieillir sans nous avoir fait bien comprendre que le « je », l’identité à laquelle nous tenons coûte que coûte, n’est autre que le reste dont notre époque de cannibalisme scientifique doit s’accommoder pour le meilleur et pour le pire.

  • 1
    Annie Dillard, Holy the Firm, New York, Harper Perennial, 1998 [1977].
  • 2
    Val Plumwood, The Eye of the Crocodile, Canberra, ANU Press, 2012.
  • 3
    Emmanuel Coccia, Métamorphoses, Paris, Payot et Rivages, 2020.
  • 4
    Roy Porter, The Greatest Benefit to Mankind: A Medical History of Humanity, New York, W.W. Norton & Company, 1997, p. 308. Voir aussi Frédéric Worms, « Comment la notion de milieu intérieur a-t-elle transformé la vie », Radio-France (émission Avec philosophie), décembre 2022, https://podcasts-francais.fr/podcast/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/comment-la-notion-de-milieu-interieur-a-t-elle-tra.
  • 5
    Les travaux de Nikolas Rose ont décrit cela en détails dans un cadre théorique différent, celui du biopouvoir et de la biopolitique. Voir : Nikolas Rose, The Politics of Life Itself : Biomedicine, Power, and Subjectivity in the Twenty-First Century, Princeton, Princeton University Press, 2006.
  • 6
    J’emprunte le terme au phénoménologue américain Drew Leder. Voir : Drew Leder, The Absent Body, Chicago, University of Chicago Press, 1990.